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Les promoteurs du barrage de Sivens sont indemnisés avec la bénédiction du Collectif Testet, les militants eux, sont floués

mardi 15 décembre 2015, par Puissance Plume

L’annonce d’un "protocole transactionnel" a été rendue publique : l’État va payer 3,3 millions d’euros pour que le département abandonne le projet initial de barrage de Sivens. Les gens qui se sont mobilisés pour occuper la vallée du Testet, eux, ils peuvent aller se faire voir. Car tout ceci se passe avec la bénédiction du Collectif Testet et de FNE qui n’ont rien fait depuis un an pour obtenir l’annulation des arrêtés. Voici comment ça se passe.


11 décembre 2015 : arrangement entre l’État et le CG81

On le savait dans les tuyaux cet arrangement. Le projet de barrage (le projet initial) est mort depuis le meurtre de Rémi Fraisse, le 26 octobre 2014. La Ministre avait demandé de faire cesser les travaux. Les promoteurs du projet étaient furax mais l’État leur avait promis du pognon. Après un an d’attente, voici le pognon ; ils appellent ça un "protocole transactionnel" [1].

Le CG81 touche 2,097 millions d’euros qu’il va reverser aux entreprises qui ont bossé pour la destruction de la zone humide du Testet. En récompense. La CACG, la FNSEA, tous ces gens qui développent l’agriculture industrielle, détruisant les emplois de petits paysans et détruisant l’environnement, il faut leur verser de l’argent, les remercier pour ce qu’ils ont fait.

Le CG81 touche 1,3 millions d’euros pour remettre en état la zone humide du Testet.

Et le CG81 s’engage à

solliciter sans délais l’abrogation de l’arrêté inter-préfectoral du 3 octobre 2013 autorisant le projet initial de création de la retenue.

Nous y revoilà : la fameuse abrogation... Vous vous souvenez peut-être ? Qui avait demandé au Préfet l’abrogation en novembre 2014 ? FNE et Collectif Testet [2]. Voyons un peu le bilan de leur (non)action en justice pour nous autres, militants de terrain...


Après le 26 octobre 2014, FNE et Collectif Testet ont aidé le Préfet à gagner du temps sur les affaires juridiques

Revenons au 26 octobre 2014. L’assassinat du jeune militant écologiste par les forces du désordre fait le tour du monde. Des manifestations se déclenchent un peu partout en France. Une grande émotion envahie la jeunesse : dans quel pays vit-elle en réalité ?

Collectif Testet pouvait attaquer en référé grâce au rapport Forray-Rathouis, paru le 27 octobre 2014, qui contient, officiellement donc, tous les arguments pour déclarer ce projet illégal. C’est le moment où les opposants au barrage avaient le plus de chances d’obtenir l’annulation des arrêtés DUP et DIG [3]. Mais non ! Après une courte hésitation, les associations environnementalistes ont refusé d’attaquer en justice pour obtenir l’annulation et au contraire... ont demandé l’abrogation !

L’abrogation est le contraire de l’annulation car l’abrogation signifie que tout ce qui a été fait jusqu’à la date d’abrogation est déclarée légal. Donc, pour quelle raison demander l’abrogation ? Cela ne peut s’expliquer, quand on connaît le droit de l’environnement et de l’urbanisme, que par le fait que les requérants veulent aider la Préfecture - celle qui a dévasté la zone et tué Rémi Fraisse - à arranger l’affaire. Évidemment, le Préfet a refusé d’abroger en décembre 2014 puisqu’il fallait que toutes les parties soient d’accord. Et pour se mettre d’accord, il faut du temps...

Ensuite, en avril 2015, FNE et Collectif Testet ont déposé un mémoire complémentaire dans une autre affaire : celle de l’arrêté "espèces protégées" [4]. Pour quelles raisons précises ? C’est dérisoire, incompréhensible, futile, minable. La zone humide est détruite, les travaux sont arrêtés ! En réalité, cela ne peut s’interpréter que par la volonté de différer le jugement des affaires par le Tribunal Administratif de Toulouse. En fait, ils ont fait cela pour que le Préfet gagne du temps.

Techniquement, le jugement aurait du survenir moins de deux ans après les recours. L’affaire aurait dû être jugée rapidement si la suspension avait été obtenue, comme ça s’est fait à Roybon. Mais ici à Sivens, c’est sans compter sur les chefs du Collectif Testet (tous encartés EELV) et leurs zadistes de service (derrière leur chef Philippe Ben Lefetey), qui sont comme cul et chemise avec la Préfecture : toutes les parties sont visiblement d’accord pour faire durer, attendre. Attendre quoi ?
- Que le Préfet et le CG se soient mis d’accord sur les transactions financières, et
- que le Préfet ait abrogé les arrêtés.


Conséquences de l’attitude de FNE et Collectif Testet pour les militants de terrain

Pour les gens qui se sont mobilisés en occupant la vallée du Testet, l’attitude de FNE et Collectif Testet constitue une perte sèche immense, et une trahison vis-à-vis du Collectif Testet car ce sont les mêmes personnes dans cette association qui ont soutenu les occupants de la vallée puis finalement les ont lachés sur le plan juridique.

D’abord, durant la période du 26 octobre 2014 au 6 mars 2015, les habitants de la vallée du Testet sont menacés et agressés par des milices, composées de pro-barrages [5] et d’énervés de type "on est chez nous" [6]. Ces agresseurs bénéficient d’une impunité totale : les militaires de la Préfecture les regardent faire leurs exactions sans les inquiéter.

Pourquoi cette impunité ? Parce que sur le plan juridique, les pro-barrages sont dans la légalité et que les opposants dans l’illégalité. Le Collectif Testet et FNE, en refusant de chercher à renverser les rôles, ont encouragé l’escalade de la violence envers les occupants "sans droit ni titre". Pour en arriver à une expulsion inhumaine et vengeresse le 6 mars 2015.

Deuxièmement, sur le plan pénal : de nombreux militants se sont vus poursuivis par les flics devant les tribunaux suite aux manifestations. À chaque fois, le contexte de l’illégalité sans droit ni titre des vainqueurs de la vallée du Testet pesait sur les accusés. Si FNE et Collectif Testet avaient normalement fait leur boulot au niveau juridique, ils auraient attaqué en novembre 2014 avec le rapport Forray et auraient assurément obtenu une victoire qui aurait pesée sur les sentences prononcées à l’encontre des militants. C’était du moins l’attitude normale qui aurait du être la leur.

Pour résumer, FNE et Collectif Testet ont donc :
- refusé d’attaquer avec un référé en urgence archi-gagnable en novembre 2014
- au contraire, demandé l’abrogation au Préfet qui ne pouvait pas l’accorder, en novembre/décembre 2014,
- omis de verser le rapport Forray au dossier pendant un an [7],
- retardé le jugement avec le mémoire complémentaire sur les espèces protégées en avril 2015
- menti sans cesse aux adhérents, aux militants en déclarant que tout ceci n’était que des considérations émanant de "complotistes", des gens qui verraient le mal partout.


Conclusions : occupants sans droit ni titre, attention à FNE !

Le Collectif Testet, après avoir fonctionné plus ou moins en synergie pendant un an avec le collectif d’occupation de la vallée du Testet, a lâché et trahi après la mort de Rémi tous les gens qui se sont mobilisés pour venir s’opposer physiquement aux travaux.

Ils disent que

« Ce n’est pas grave, on peut gagner l’annulation après l’abrogation ».

Balivernes ! Discours de politicards poly-tocards : « Demain, demain demain : toujours demain ! » [8].

Ces gens sont victimes de leurs propres mensonges. Soit ils ne comprennent rien, soit ils sont dans la haine envers ce peuple qui s’est bougé contre le barrage. Peut-être dans les deux à la fois. Peut-être n’ont-ils aucune conscience de l’importance du rapport de force entre ce qui est légal, et ce qui est illégal ?

En tous les cas, il faut être prudent quand on se mobilise sur l’invitation d’associations environnementalistes. L’appât du siège offert dans les bureaux des Préfectures sera toujours plus fort...

Notes

[3Les arrêtés DUP (Déclaration d’Utilité Publique) et DIG (Déclaration d’Intérêt Général) des 2 et 3 octobre 2013 sont les actes administratifs fondateurs du projet de barrage.

[4C’est l’acte administratif par lequel le Préfet autorise le CG81 à détruire les espèces protégées par ce qu’ils appellent dérogation.

[5comme Laurent Viguier, secrétaire de la FDSEA du Tarn-et-Garonne par exemple

[6Des gens qui ignorent que ces sont des étrangers et des sans-papiers qui ont libéré la France en 1944.

[8Refrain des fabulous trobadours.

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