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Gymnastique 2017 : réflexion... Abstention !

dimanche 1er janvier 2017, par Puissance Plume

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Gymnastique 2017 : réflexion... Abstention !

Des personnes accèdent à la célébrité mondiale grâce à leurs talents. Ils affichent des bons sentiments, le succès ne leur monte pas à la tête. L’hélicologiste Nicolas Hulot crame du kérosène et fréquente le palais de l’Élysée par « conviction écologique ». Jean-Luc Mélenchon veut devenir président de la République pour « redonner le pouvoir au peuple ». Je leur reproche de ne pas se satisfaire du bonheur d’une vie simple, étant donné que leur notoriété n’est due qu’à la fureur énergétique, laquelle dévaste le monde.

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Redonner le pouvoir au peuple ?

Mais ce « pouvoir » que Jean-Luc veut nous « redonner », nous l’avons déjà ! Il est en nous déjà ! Nous l’exerçons peu, voilà le problème. Demander à quelqu’un de nous le (re ?)donner, voilà la contradiction.

Je définis la démocratie comme le système dans lequel chacun pèse le même poids dans la décision. Au contraire, l’élection donne tous les poids à l’élu, et aucun à l’électeur. Voter à la présidentielle, c’est participer à ce système, c’est le nourrir, l’enrichir. C’est finalement l’améliorer.

La seule victoire du peuple au soir d’une élection présidentielle, ce serait celle d’une abstention volontaire en conscience. Nous avons ce pouvoir, et nous pouvons être majoritaires..

En 2012, je me suis rendu au bureau de vote, j’ai demandé si j’étais bien inscrit, « oui Frédéric » m’a répondu le maire, « hé bien je ne vote pas ; je veux changer de système ; je ne participe pas à celui-ci ». Après cela, il n’est plus possible de me qualifier d’abstentionniste je-m’en-foutiste. Je ne pratique pas la chaise vide ; je prend ma place sans m’asseoir sur ce siège qu’on me fabrique. Je proclame l’illégitimité de l’Assemblée Nationale : elle est injuste !

Vers les années 2010, j’ai suivi avec intérêt les différents travaux pour une VIè République. Étienne Chouart, André Bellon, l’expérience islandaise : les débats ne manquent pas. Ce n’est pas parce que J.-L. Mélenchon reprend l’idée d’une constituante que je voterai pour lui. Et ce n’est pas parce que je ne vote pas pour lui que cette idée m’est indifférente ! Je ne souhaite pas faire table rase du passé, ni une guerre civile, ni le chaos. C’est une attitude banale que de ne pas jouer le jeu qu’on veut nous faire jouer. Les extrémistes, les fous, eux s’y prennent autrement.

Certains se disent : « ça m’escagasse de laisser la place aux autres candidats ! » Quand on a été habitué à jouer au jeu, on a du mal à s’en défaire, c’est addictif. Les Français sont joueurs, ça se voit au bureau de tabac. Comment se défaire de la peur du Front National : une cure de désintoxication du jeu ? Car le problème n’est sûrement pas de s’arrêter de lutter contre la société fascisante, le problème est d’arrêter de jouer le jeu que la technocratie organise pour nous divertir.

Je navigue moi aussi sur l’océan de mes propres peurs. Après le grand mensonge de l’U.R.S.S. au XXè siècle, une question fondamentale m’accompagne ou me hante : « les solutions envisagées ne sont-elles pas pires que les problèmes qu’elles sont censées résoudre ? ». Envoyer Jean-Luc Mélenchon ou un autre aux postes de domination de cette République ne me semble pas être une solution meilleure, je n’ai pas envie de céder aux apparences.

Retourner les armes contre l’adversaire ?

Pour lutter contre ce système électoral qui nous opprime gentillement, il faudrait l’utiliser, il faudrait retourner ses armes contre lui. Parfois je me convaincs que je me sers du pétrole aujourd’hui pour demain m’en passer. Ce message naïf n’est pas bon, surtout pour une présidentielle.

Ayant eu l’expérience de me présenter à des élections, j’ai vérifié l’axiome de Guy Debord : quand on monte sur les planches de la société du spectacle, les gens n’en perçoivent que le jeu de scène. On peut dire ce qu’on veut, le fait de jouer un rôle dans ce système électoral est contradictoire avec la volonté d’en finir avec lui. Le fait de monter sur scène suffit à donner la trajectoire qu’on voulait éviter.

Brefs épisodes d’Histoire populaire

Karl Marx disait : « Celui qui ne connaît pas l’Histoire est condamné à la revivre ». Êtes-vous prêts à revivre la trahison de François Mitterrand en 1981 ? Son épouse lui demanda pourquoi il n’avait pas accompli le programme pour lequel il avait été élu et sa réponse fut sans ambiguïté : « je n’en avais pas le pouvoir ». En région toulousaine, celles et ceux qui avaient voté pour ce personnage en pensant sauver le fleuve Garonne de la pollution chimique et radioactive furent à jamais blessés.

En 1936, le Front Populaire a pris le contrôle du gouvernement français grâce notamment à une politique d’ouverture du Parti Communiste. La réaction des militaires, des fascistes et des grands patrons fut d’une violence terrible : ils firent le choix de la défaite en mai 1940, et ce fut l’arrivée triomphale d’Hitler à Paris. L’école fabrique une Histoire technocratique anti-populaire, elle « oublie » donc tous ces détails. Quant à la « peur du rouge », elle est ancrée dans les idéologies conservatrices en France. Elle mobilise toujours autant. On ne peut pas nier qu’elle a quelques fondements.

Je ne veux pas faire l’oiseau de mauvaise augure. Je me dis que si Mélenchon dominait l’Assemblée Nationale en réalisant un programme autoritaire « d’ultra-gauche », les militaires payés par les grands patrons pourraient nous précipiter dans le chaos, comme ils l’ont fait en Espagne en 1936, comme ils l’ont fait récemment avec le peuple syrien trop émancipé à leur goût qu’il était et qu’il est toujours malgré son éclatement.

En regardant ces histoires, je me dis que nous ne devons pas offrir nos vies aux sentiments extrémistes exacerbés, sans rien céder sur la lutte qu’il faut mener avec la plus grande force contre la technocratie mondialisée et les extrémistes qu’elle manipule.

Président faible face aux technocrates

Bientôt grâce à la « République Numérique », les banques mondiales s’en moqueront de savoir qui est président de la République Française. Le rêve de Google, Apple, Facebook, Amazon, c’est bien de supprimer les États dont la lenteur bureaucratique gêne leur développement forcené. Est-ce que je n’accélère pas ce mouvement en prônant l’abstention ?

J’invite le puissant rebelle qui est au bout de ces lignes – le lecteur, la lectrice – à découvrir l’Histoire de la lutte contre la technocratie via les écrits du collectif Pièces et Main d’œuvre(1), et surtout dérouler la pelote des bibliographies sur lesquelles ils s’appuient. Commandez leurs brochures, lisez-les, distribuez-les !

Face au transhumanisme – une idéologie de nouvelle race qui s’écoute sans problème sur France Inter –, face aux ravages que réalisent les technologies numériques sur le conditionnement mental des jeunes générations, un président est faible. Car le poste est organiquement dominé par les technocrates, il n’y a aucun mal à prévoir l’inévitable quel que soit l’élu : ce sera la poursuite sans limite du remplacement des activités humaines par les machines mondialisées et inter-connectées, le rêve du P.D.G. de Google.

Guérilla

Connaissez-vous la métaphore du bocal ? Prenez un bocal. Mettez-y des grosses pierres, puis des cailloux, puis du sable. Le tout rentre facilement. Retirez les ingrédients, remplissez à nouveau le bocal en commençant par le sable, ajoutez les cailloux, et enfin les grosses pierres. Ça ne rentre plus ! La vie est ainsi faite : lorsque vous remplissez votre vie avec des choses futiles, il n’y a plus assez d’espace pour les choses essentielles(2).

Ne laissons pas ces élections futiles coloniser nos esprits. Vivons notre vie en mode guérilla contre la technocratie mondialisée et ses commerciaux endimanchés aux cheveux ras. L’essentiel, c’est de défendre l’espace vital que nos ancêtres ont défendu. Repousser l’envahisseur numérique est à la portée de chacun-e et des petits collectifs. Aménager sa vie pour dépendre de moins en moins des grands groupes. Encourager la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes, participer à un collectif anti-linky est plus important que d’organiser des meetings de « France Insoumise », slogan de J.-L. Mélenchon. Utilisons notre pouvoir sans autoritarisme, avec le moins de contradictions possibles. Ne pas sombrer dans l’espoir. Ce dernier est nécessaire, mais il peut entraver la lucidité. Pour 2017 donc, réflexion… Abstention !

(1) http://www.piecesetmaindoeuvre.com/
(2) Merci à Flow ; http://infokioskbokal.over-blog.com/

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