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Exercice de connaissance du monde en langue française

dimanche 27 janvier 2013, par Puissance Plume

A vos bureaux et à vos plumes !
Lecture et rédaction, ça doit prendre 15 bonnes minutes quand même.
Je vous souhaite un bon exercice pour celles et ceux qui peuvent prendre ce temps.
Euh... Il n’y a rien à gagner de ma part :-)

  1. Lisez le texte ci-dessous.
  2. Situez l’époque, donnez une décennie.
  3. Situez la culture politique de l’auteur. Argumentez.
  4. Situez la culture religieuse de l’auteur. Argumentez.

Vous pouvez donner des réponses dans les commentaires par exemple.



« Le mot Révolution n’est pas pour nous, Français, un mot vague. Nous savons que la Révolution est une rupture, la Révolution est un absolu. Il n’y a pas de révolution modérée, il n’y a pas de révolution dirigée – comme on dit l’économie dirigée. Celle que nous annonçons se fera contre le système actuel tout entier, ou elle ne se fera pas. Si nous pensions que ce système est capable de se réformer, qu’il peut rompre de lui-même le cours de sa fatale évolution vers la Dictature – la Dictature de l’argent, de la race, de la classe ou de la Nation – nous nous refuserions certainement à courir le risque d’une explosion capable de détruire des choses précieuses qui ne se reconstruiront qu’avec beaucoup de temps, de persévérence, de désintéressement et d’amour. Mais le système ne changera pas le cours de son évolution, pour la bonne raison qu’il n’évolue déjà plus ; il s’organise seulement en vue de durer encore un moment, de survivre. Loin de prétendre résoudre ses propres contradictions, d’ailleurs probablement insolubles, il paraît de plus en plus disposé à les imposer par la force, grâce à une réglementation toujours plus minutieuse et plus stricte des activités particulières, faite au nom d’une espèce de socialisme d’état, forme démocratique de la dictature. Chaque jour en effet, nous apporte la preuve que la période idéologique est depuis longtemps dépassée, à New York comme à Moscou ou à Londres. Nous voyons la Démocratie ploutocratique américaine et l’Empire marxiste des Dominions soviétiques sinon marcher la main dans la main – il s’en faut ! - du moins poursuivre le même but, c’est-à-dire maintenir coûte que coûte, fût-ce en ayant l’air de le combattre – le système à l’intérieur duquel ils ont tous acquis richesse et puissance. Car, à la fin du compte, la Russie n’a pas moins tiré profit du système capitaliste que l’Amérique ou l’Angleterre ; elle y a joué le rôle classique du parlementaire qui fait fortune dans l’opposition. Bref, les régimes jadis opposés par l’idéologie sont maintenant étroitement unis par la technique. Le dernier des imbéciles, en effet, peut comprendre que les techniques des gouvernements en guerre ne diffèrent que par de négligeables particularités, justifiées par les habitudes, les mœurs. Il s’agit toujours d’assurer la mobilisation totale pour la guerre totale, en attendant la mobilisation totale pour la paix totale. Un monde gagné pour la Technique est perdu pour la Liberté.

En parlant ainsi, je me moque de scandaliser les esprits faibles qui opposent aux réalités des mots déjà dangereusement vidés de leur substance, comme par exemple celui de Démocratie. Qu’importe ! Si vous êtes trop lâches pour regarder ce monde en face afin de le voir tel qu’il est, détournez les yeux, tendez les mains à ses chaînes. Ne vous rendez pas ridicules en prétendant y voir ce qui n’existe que dans votre imagination ou dans le bavardage des avocats. Ne commettez pas surtout l’infamie de lui prostituer le mot de révolution, ce mot religieux, ce mot sacré, tout ruisselant à travers les siècles du sang des hommes. Ne lui prostituez pas non plus le mot de progrès. Jamais un système n’a été plus fermé que celui-ci, n’a offert moins de perspectives de transformations, de changements, et les catastrophes qui s’y succèdent, avec une régularité monotone, n’ont précisément ce caractère de gravité que parce qu’elles s’y passent en vase clos. Qu’il s’intitule capitaliste ou socialiste, ce monde s’est fondé sur une certaine conception de l’homme, commune aux économistes anglais du XVIIIè siècle, commes à Marx ou à Lénine. On dit parfois de l’homme qu’il était un animal religieux. Le système l’a défini une fois pour toutes un animal économique, non seulement l’esclave mais l’objet, la matière presque inerte, irresponsable du déterminisme économique, et sans espoir de s’en affranchir, puisqu’il ne connaît d’autre mobile certain que l’intérêt, le profit. Rivé à lui-même par l’égoïsme, l’individu n’apparaît plus que comme une quantité négligeable, soumise à la loi des grands nombres ; on ne saurait prétendre l’employer que par masses, grâce à la connaissance des lois qui le régissent. Ainsi, le progrès n’est plus dans l’homme, il est dans la technique, dans le perfectionnement des méthodes capables de permettre une utilisation chaque jour plus efficace du matériel humain.

Cette conception, je le répète, est à la base de tout le système, et elle a énormément facilité l’établissement du régime en justifiant les hideux profits de ses premiers bénéficiaires. Il y a cent cinquante ans, tous ces marchands de coton de Manchester – Mecque du capitalisme universel – qui faisaient travailler dans leurs usines, seize heures par jour, des enfants de douze ans que les contremaîtres devaient, la nuit venue, tenir éveillés à coups de baguettes, couchaient tout de même avec la Bible sous leur oreiller. Lorsqu’ils leur arrivait de penser à ces milliers de misérables que la spéculation sur les salaires condamnait à une mort lente et sûre, ils se disaient qu’on ne peut rien contre les lois du déterminisme économique voulues par la Sainte Providence, et ils glorifiaient le bon Dieu qui les faisait riches... Les marchands de coton de Manchester sont morts depuis longtemps, mais le monde moderne ne peut les renier, car ils l’ont engendré matériellement et spirituellement, ils l’ont engendré au Réalisme – dans le sens où saint Paul écrit à son disciple Timothée qu’il l’a engendré dans la grâce. Leur réalisme biblique, devenu athée, a maintenant des méthodes plus rationnelles. Le génie américain résoud autrement qu’eux la question des salaires ; mais il faut avouer qu’en leur temps le matériel humain ne risquait pas de manquer, on n’avait, si j’ose dire, qu’à se baisser pour ramasser une affamé prêt à travailler à n’importe quel prix. La politique de production à outrance ménage aujourd’hui sa main d’œuvre, mais la furie de spéculation qu’elle provoque déchaîne périodiquement des crises économiques ou des guerres qui jettent à la rue des millions de chômeurs, ou des millions de soldats au charnier... Oh ! Je sais bien que des journalistes, peu scrupuleux de leur public, prétendent distinguer entre ces deux sortes de catastrophes, mettant les crises économiques au compte du Système, et les guerres à celui des dictateurs. Mais le déterminisme économique est aussi bon pour justifier les crises que les guerres, la destruction d’immenses stocks de produits alimentaires en vue seulement de maintenir les prix comme le sacrifice de troupeaux d’hommes. N’est-ce pas le propre vice-président des états-Unis, M. Wallace, qui citait dernièrement, au tribunal de l’Histoire, les maîtres de la spéculation universelle, les chefs des grands truts internationaux, les contrôleurs de marchés auxquels il faut une guerre tous les vingt ans ?

Ce qui fait l’unité de la civilisation capitaliste, c’est l’esprit qui l’anime, c’est l’homme qu’elle a formé. Il est ridicule de parler des dictatures comme de monstruosités tombées de la lune, ou d’une planète plus éloignée encore, dans le paisible univers démocratique. Si le climat du monde moderne n’était pas favorable à ces monstres, on aurait pas vu en Italie, en Allemagne, en Russie, en Espagne des millions et des millions d’hommes s’offrir corps et âmes aux demi-dieux, et partout ailleurs dans le monde – en France, en Angleterre, aux états-Unis - d’autres millions d’hommes partager publiquement ou en secret la nouvelle idolâtrie. On observerait pas aujourd’hui encore ce curieux complexe d’infériorité qui, même sur le chemin de la victoire, semble frapper d’inhibition les Démocraties en face des régimes déjà déchus – ceux de Salazar ou de Franco – comme au temps honteux, inexpiable, de la guerre d’éthiopie, ou à celui, plus abject encore, de la non-Intervention espagnole.

Il est possible que ces vérités déplaisent. Lorsque, en vue de cet entretien, je commmençais à les mettre en ordre sur le papier, la tentation m’est venue plus d’une fois de leur substituer quelques autres vérités incapables de choquer personne, inoffensives. Pour dominer cette tentation, ce n’est pas à mon pays que j’ai pensé d’abord – j’ai pensé aux amis de mon pays. Je dois ces vérités françaises aux Amis de mon pays. En les leur donnant, je n’ai pas la prétention de les détacher dès maintenant de certains préjugés faciles. Je leur demande de garder ces vérités dans quelque coin de leur cerveau, dans quelque repli de leur cœur, pour le jour où la France, écartant amis et ennemis, se montrera de nouveau telle qu’elle est, fera face ! Ils verront alors que je ne leur ai pas menti. »

« Le danger n’est pas dans les machines, sinon nous devrions faire ce rêve absurde de les détruire par la force, à la manière des iconoclastes qui, en brisant les images, se flattaient d’anéantir aussi les croyances. Le danger n’est pas dans la multiplication des machines, mais dans le nombre sans cesse croissant d’hommes habitués, dès leur enfance, à ne désirer que ce que les machines peuvent donner. »

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